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vendredi 23 décembre 2016

Interview d' Adam Klags

Si je ne connais pas Adam Klags en personne nous avons de multiples connaissances communes dans la communauté Japonaise du tenkara et la lecture de son blog m'a permis d'entrer en contact avec lui qui est un vrai passionné du tenkara tel qu'il se pratique au Japon. Si le tenkara se développe de plus en plus en Occident c'est entre autre grâce à des personnes tel Adam Klags qui prend les informations à la source et les transmet à travers son blog. Cela a été aussi ma démarche depuis la création de Tenkara Normandie.
Bonne lecture!

Bonjour Adam! Comment vas-tu? On se connaît par les réseaux sociaux comme beaucoup de gens dans la communauté internationale du tenkara même si nous ne nous sommes jamais rencontrés, peux-tu te présenter aux lecteurs de Tenkara Normandie?

Adam Klags: Bien sûr, Christophe, merci de m'avoir proposé cette interview! Mon nom est Adam, mais beaucoup de gens m'appelle simplement Klags, une abréviation de mon patronyme. Je suis un passionné d'activités outdoor depuis mes premiers souvenirs d'enfance. Actuellement je suis grossiste en vins à New York City pour un importateur fantastique de vins fins. J'aime vraiment le vin mais ma passion sont les activités outdoor. Bien que la plupart des gens m'identifie par rapport à mon métier et ma carrière je préfère m'identifier à travers mes passions comme la pêche, la randonnée et autres. 

Quand j'ai découvert le tenkara grâce aux vidéos et au blog de Masami Sakakibara j'ai d'abord décidé d'essayer cette technique et c'était si génial de découvrir enfin la technique qui soit exactement ce que j'avais attendu si longtemps que j'ai décidé de commencer un blog pour partager mon expérience et aider d'autres pêcheurs à découvrir le tenkara. Tu publies depuis l'automne 2014 le blog "Of rock and riffle", comment as-tu découvert le tenkara? Quel a été ton parcours en tant que pêcheur? As-tu fait d'autres blogs ou sites internet dans le passé? 

Mon parcours en tant que pêcheur se résume principalement à la pêche à la mouche. Bien sûr enfant j'ai commencé à pêcher avec un kit basique de pêche au lancer. Ma première canne était une canne en plastique Fisher Price avec laquelle je prenais des poissons chats et des black bass dans l'étang de notre maison de campagne dans le nord de l'état de New York. Rapidement je suis passé à un ensemble canne/moulinet adaptée aux petits ruisseaux mais c'était peu de temps avant que je commence la pêche à la mouche.
J'ai découvert la pêche à la mouche à 12 ans. Le gars de la boutique locale voulait me faire essayer et j'ai été immédiatement intrigué. Mon père m'a offert un kit de pêche à la mouche pour débutant Redington, un kit de montage très basique Orvis et j'étais accroc!
J'ai passé plusieurs années à explorer le bassin versant de la Croton à New York en vélo pendant l'adolescence et j'ai commencé à emmener ma canne à mouche de plus en plus souvent. Rapidement je me suis arrangé pour me faire offrir une paire de waders et alors j'ai été réellement capable d'embrasser la pêche à la mouche. Mais ce ne fût que lorsque je commençais à prendre en compte le poids de mon sac de randonnée que je découvris le tenkara. Je cherchais sur le site backpackinglight.com des informations sur le matériel et des façons de réduire le poids de mon sac. J'ai eu une blessure au genou qui n'a jamais vraiment été suivie ni réparée et cela m'avait posé des problèmes sur des randonnées longues. Durant une conversation quelqu'un m'a recommandé d'échanger mon matériel de pêche à la mouche lourd contre une canne ultra-légère "Hane". J'ai découvert ensuite que cette canne était le fruit d'une collaboration entre la naissante compagnie Tenkara USA et Backpackinglight.com.
Je suis allé sur le site Tenkara USA et j'ai acheté un kit Iwana immédiatement. A partir de ce jour j'ai commencé à ne pêcher qu'au tenkara pour vraiment apprendre à pêcher alors que je ne l'avais jamais vraiment compris de cette façon auparavant. Le tenkara était devenu pour moi une porte donnant sur un monde de pêche à la mouche réussie. Avant le tenkara je n'avais pas compris pourquoi une ligne flottante ou coulante pouvait faire la différence, pourquoi mon bas de ligne devait avoir une certaine longueur, la puissance d'une canne courte ou longue, où les poissons se tiennent et mangent, et le plus important, comment les attraper! J'ai réalisé qu'au lieu de balancer des spaghetti contre le mur pour voir si ils restent collés je pouvais simplement lancer à des endroits précis et faire dériver ma mouche de plusieurs façons et grâce à cela prendre du poisson!
Depuis lors j'ai essayé beaucoup de types de cannes, appris sur le keiryu pour finalement me concentrer sur le tenkara Japonais, ou le tenkara dans sa véritable définition. Quel voyage amusant ça a été pour arriver là!
Vers 2012 j'ai découvert un blog appelé "Small Stream Reflections" qui était, et l'est d'ailleurs encore, publié par Alan Petrucci du Connecticut. De multiples façons il a été une inspiration pour mon blog. En 2013 j'ai commencé à m'engager avec ce blog et en 2014 j'ai décidé de commencer mon propre blog dédié à la pêche des petits cours d'eaux au tenkara et "Of Rock and riffle" était né. A l'origine je voulais seulement faire un journal électronique pour moi-même, archiver mes photos et mes expériences en ligne plutôt que sur papier. 
Toutefois des gens ont trouvé le blog et ont commencé à le lire donc j'ai continué. C'est amusant d'écrire sur ses propres aventures mais c'est encore mieux de les partager avec d'autres personnes. C'était ma première expérience de blogger et cela m'a semblé naturel dès le premier jour.


Quand la plupart des gens qui ne sont pas Américains pensent à la pêche aux Etats-Unis ils pensent d'emblée au Colorado, à l'Utah ou au Montana mais seulement une infime minorité pensera à New-York; il semble que ce soit une erreur car il y a une forte communauté de pêcheurs au tenkara qui s'est créée dans l'état de New York. Peux-tu nous en dire plus sur la communauté new-yorkaise du tenkara?

Tu soulèves un point très intéressant Christophe! C'est vrai. La plupart des gens pensent à ces grands états de l'Ouest comme le Wyoming, le Montana ou le Colorado. Et pour une bonne raison! Le nombre de poissons au kilomètre de rivière, l'abondance d'eau claire et fraîche, la haute montagne, l'eau de fonte créent une chaîne alimentaire idéale et d'excellentes conditions de vie pour un nombre infini de poissons...et beaucoup de gros poissons aussi! Toutefois New-York est le berceau de la pêche à la mouche sèche. Les montagnes des Catskill, à seulement deux heures de route du centre de New-York City, sont un véritable joyau pour les pêcheurs à la mouche. Bien qu'il n'y aient ni glaciers ni sommets enneigés en permanence il y a beaucoup de sources et d'aquifères transportant de l'eau froide et saine vers la surface créant une abondance de ruisseaux et de cascades où vivent des saumons de fontaine aussi bien que des truites fario et arc en ciel là où les autorités en introduisent. La clé est la présence de saumons de fontaine, qui est l'espèce de salmonidé native de la côte Est, et qui est en danger d'extinction à cause du développement moderne, de la pollution et d'actions inconsidérées de l'homme.
Ces riusseaux, tout comme certaines grandes rivières comme la Beaverkill, les deux branches du Delaware, la Willowemoc, et d'autres ont contribué à booster la communauté avec leurs opportunités de prendre de beaux poissons, de pêcher des zones plus profondes et leur plus grande activité en terme d'éclosions d'insectes. Ces rivières n'ont pas seulement aidé à définir la pêche à la mouche à New-York mais dans le monde. Il y a beaucoup à apprendre sur la région mais on dit dans les Catskill que c'est là que la pêche à la mouche sèche a été inventée. Je ne vais pas utiliser des pages et des pages pour vous raconter toutes ces histoires mais je vous recommande de lire les très nombreux livres publiés sur le sujet. Ce que vous découvrirez est qu'essentiellement la côte Est, et non la côte Ouest, est où la pêche à la mouche a décollé et que c'est à New-York qu'elle est née.
Au-delà des Catskills l'état de New-York a des tonnes de bons coins de pêche qui sont négligés ou surpeuplés. Les monts Adirondack était autrefois mieux peuplés en truites que les Catskills mais cet environnement a été rapidement détruit par la révolution industrielle. Ce n'est pas avant les années 1990 et le "Clean air act" que nous avons finalement été capables d'y ramener du poisson. Aujourd'hui il y a enfin les premiers signes d'un rétablissement. Pendant ce temps les grandes rivières de la région sont empoissonnées et pleines de truites fario surdensitaires de 12 à 21 pouces (ndr: 30 à 53 centimètres), on y trouve aussi des saumons de fontaine sauvages et des arc en ciel.
En plus de cela l'état de New York voit de belles populations de saumons qui remontent dans les rivières du nord-ouest chaque printemps et automne. Ces rivières ne sont pour la plupart pas des rivières adaptées à la pêche au tenkara bien qu'elles comportent des zones qui le soient. La pêche du saumon est extrêmement populaire et les berges sont souvent bien trop fréquentées pour que j'ai envie d'y aller. J'ai essayé quelques fois et c'est vraiment amusant mais ce n'est pas le genre de pêche que j'apprécie le plus.
Fondamentalement vous trouverez à New-York les mêmes richesses que dans les autres états mais des chaînes de montagnes plus courtes, moins d'espaces sauvages, plus de population humaine et moins de poissons. Malgré tout je n'échangerais cela pour rien au monde, il y a quelque chose de spécial à New-York que les autres états n'ont pas. Ou peut-être que c'est juste parce que je suis new-yorkais?!



Merci de dresser ce portrait de New-York en tant que région potentiellement intéressante pour la pêche au tenkara, c'est vraiment plus intéressant que les clichés habituels sur "La Grosse Pomme", la "jungle de béton" et autres du même genre. Ta passion pour le tenkara t'a amené, comme quelques uns d'entre nous, à voyager pour rencontrer diverses communautés de pêcheurs au tenkara. Tu es allé en Italie et au Japon et ma question est celle-ci: Avais-tu jamais imaginé voyager aussi loin pour rencontrer d'autres pêcheurs? Et plus important à mon avis: à quel point est-ce important pour toi de faire ce type d'expérience?

C'est une bonne question...premièrement, non, je n'avais jamais imaginé que je voyagerais pour rencontrer d'autres pêcheurs de par le monde comme je l'ai fait ces dernières années. En fait je n'aimais pas voyager. Je trouvais ça épuisant, cher et gourmand en temps. Le vrai problème est que je n'aimais pas voyager en tenant compte des plannings et projets des autres. Je ne suis pas très bon pour prétendre apprécier ce que je n'aime pas vraiment faire...et pendant des années je n'ai pas voyagé parce que mes premières impressions ne m'aidaient pas vraiment à rendre l'idée de voyager plaisante. Toutefois, plus récemment, j'ai découvert de nouveaux médicaments contre les maux du voyage et j'ai commencé à voyager seul. Faire mes propres choix de destination et de dates a été la clé...ça a changé l'expérience de se sentir traîné d'une attraction touristique à l'autre et de ne jamais faire d'expérience personnelle à être capable de s'immerger dans une expérience de voyage et vraiment l'apprécier. J'ai réalisé que puisque j'aimais pêcher pourquoi irais-je à Paris et faire la tournée des musées alors que les seules choses auxquelles je penserais sont les rivières et les montagnes? Une petite lumière s'est allumée dans mon esprit et j'ai réalisé qu'il fallait seulement que je fasse ce que je fais ici dans d'autres pays. Ensuite j'ai juste commencé à le faire...ce n'est pas difficile.
J'entre en relation avec des gens et dans certains cas je l'ai contacté en ligne et on établit les projets ensemble. J'ai écrit un article détaillé à ce sujet pour le magazine Tenkara Angler et je pense que cet article vaut vraiment le coup d'être lu. Pour résumer...faites le. Vous ne le regretterez pas.
Quant à savoir comment cela a affecté mon expérience du tenkara c'est encore plus difficile à résumer dans une interview mais je dirai que tout est dans la perspective. C'est une chose de s'asseoir face à un ordinateur et lire les commentaires des autres, lire leurs articles, regarder leurs videos et d'essayer de se décider sur les cannes, comment pêcher, quelle mouche utiliser, quelle ligne, etc mais ça ne mène nulle part si vous n'allez pas à la pêche et n'essayez pas vraiment d'apprendre pourquoi ces éléments comptent. Et vous ne pouvez pas faire sans la perspective des autres ni sans d'autres personnes qui vous montrent ce qu'ils font et ce qu'ils ne font pas et pourquoi ils font ou ne font pas certaines choses. Ensuite vous serez assez informés pour vous décider et développer votre propre style, vos montages et votre façon de pêcher si vous en avez envie. La clé est de s'éduquer. Connaître les perspectives des autres, apprendre les bases, s'appliquer à bien faire; tout cela contribue à modifier votre perspective. Une fois comprise la perspective des autres elle vous aidera à développer la vôtre.
Voyager au Japon pour le tenkara a été un sommet de mon expérience parce que ça m'a aidé à une mise en contexte et une meilleure perspective. Discuter de ce qui est "vrai" ou réfléchir à ce qui est "correct" sur internet peut avoir de la valeur mais c'est rarement seulement basé sur la logique et l'expérience personnelle. Il faut vraiment chercher à comprendre l'histoire, la culture et le contexte si vous voulez vraiment comprendre le tenkara. Le tenkara est Japonais, pas Américain. Il y a une définition du tenkara et beaucoup d'histoire et de culture derrière cette pêche. La compréhension est la première étape pour devenir un pêcheur au tenkara bien informé et efficace.

J'ai récemment lu les récits de ton second voyage au Japon pendant lequel tu as rencontré Yuzo Sebata. J'ai eu la chance de le rencontrer et je dois dire que cet homme m'a impressionné; il est une légende dans le monde du tenkara mais aussi de l'escalade, un écrivain récompensé par des prix prestigieux et un célèbre cuisinier de plantes sauvages mais il est l'homme le plus humble que j'ai jamais rencontré. Comment penses-tu que cette rencontre, et celle de sa communauté d'amis, puisse influencer ton expérience du tenkara à l'avenir? Sebata-san a développé sa propre technique en se basant sur le Nikko tenkara mais il a aussi une philosophie du rapport à la nature et du minimalisme; quel aspect est pour toi le plus important?

Comment commencer à répondre à cela...c'est presque difficile. Sebata-san est vraiment un homme intéressant et merveilleux. Je pense que j'ai eu à peine le temps de faire sa connaissance pendant le peu de temps passé ensemble et heureusement je compte lui rendre visite à nouveau et en apprendre plus. C'est un homme gentil qui rassemble les gens par sa générosité et son esprit.
J'ai vraiment apprécié l'écouter parler des plates sauvages qu'il avait cueilli pour nous les servir, tout comme les champignons. J'aime chercher des champignons moi-même et j'apprends encore comment identifier de nombreuses espèces. Sebata-san avait de merveilleux "mily caps" (ndr: lactaires) et d'autres espèces. Il les a fait sauter. Le soir suivant il a  fait un maitake tempura avec des champignons trouvés par Keiichi-san et c'était incroyablement bon. Je vis à New-York, ce n'est pas comme si je n'avais vu ces plats avant. En tant que vendeur de vins j'ai la chance d'aller dans certains des meilleurs restaurants de par le monde mais j'espère que les gens comprennent que c'était un des meilleurs maitake tempura que j'ai jamais goûté. Je suis sûr qu'en partie le lieu et le moment ont joué mais il en est toujours ainsi pour la bonne cuisine.
Un des meilleurs moments pour moi eut lieu tard dans la soirée du dernier jour quand tout le monde était rassemblé à la bansho de Tadami  autour de Sebata-san et regardé des vidéos sur des cassettes VHS. Je regardais les vidéos mais je regardais aussi Sebata-san et c'était une joie de le voir revivre ses aventures avec nous dans cette pièce. Je pense que c'était un moment vraiment spécial.
Sebata-san sait tellement de choses sur la pêche mais je pense que ce qui m'émerveille le plus à propos de lui est sa capacité à s'venturer dans des gorges aussi abruptes et leurs rivières rageuses dans des hautes montagnes avec si peu de matériel. Je ne sais pas si c'est du minimalisme réfléchi ou seulement parce que c'est un phénomène fortuit qui a fait sens dans l'esprit de Sebata-san parce que je n'ai pas eu l'occasion d'en discuter avec lui. J'espère le faire dans le futur. Mais je ne peux pas dire à quel point j'ai été impressionné par la façon dont il se déplaçait et les techniques qu'il utilisait.
A un moment nous l'avons vu sur ce petit écran de télévision traverser à la nage des rapides, y trouvant le courant un tant soi peu plus faible et réussir à traverser avec seulement son chapeau qui dépassait de la surface. A un autre moment on l'a vu attacher un cordage autour d'un rocher et le lancer dans les rapides puis attacher l'autre bout à un autre rocher pour que le poids du premier rocher combiné au courant tende le cordage afin de l'utiliser pour traverser deux cascades. Wow! Et dans toutes les vidéos Sebata-san gravissait des gorges abruptes, qui nous paraîtraient inaccessibles,  avec seulement un sac à dos contenant du riz, l'équipement minimal de pêche, une corde et sa volonté d'explorer.
J'étais aussi émerveillé d'apprendre le genryu fishing qu'il a pour ainsi dire inventé pour lequel les pêcheurs gravissent les montagnes où les rivières prennent source et ensuite redescendent l'autre versant en pêchant pour aller dans la vallée voisine. Le mot "épique" vient à l'esprit quand on regarde ces vidéos car c'est le terme qui convient pour ces expéditions. J'ai hâte que ces vidéos soient disponibles dans le reste du monde dans des formats modernes.
Pourquoi aborder tout cela pour répondre à ta question? Parce que tout cela m'a grandement influencé dans ma compréhension de différents pêcheurs au tenkara, de leurs styles et de leur équipement et cela a influencé ma réflexion sur le développement de mon tenkara à un autre niveau.


La pêche moderne au tenkara met la technique en avant, même plus que le matériel, et les gens que nous appelons les "maîtres du tenkara" tels Sebata-san, Masami Sakakibara, Dr. Hisao Ishigaki et Hiromichi Fuji sont ceux qui ont développé leur propre technique et le matériel qui leur permet de pratiquer au mieux ces techniques. J'aimerais savoir quelle est ta technique de prédilection et ton matériel préféré. Est-ce un but pour toi de pêcher à ta façon?

Le tenkara existe depuis des générations. Récemment j'ai remarqué une tendance quelque dérangeante dans des groupes de discussion Américains et aussi étrangers. J'ai noté que des gens un peu partout commençaient à utiliser le terme "tenkara" pour se référer à toutes les pêches à ligne fixe, pour n'importe quelle espèce de poisson. Bien qu'il n'y ait rien de "mal" à pêcher n'importe quelle espèce de poisson avec une canne tenkara ce n'est absolument pas du "tenkara". Le tenkara est exclusivement la pêche de la truite. La raison pour laquelle j'utilise cette définition et cette distinction est que vous n'apprendrez jamais à pêcher le black bass avec une canne tenkara d'un pêcheur ou maître Japonais. Pourquoi?
Parce qu'il y a déjà d'autres cannes, d'autres techniques, d'autres matériels pour le black bass.
Le tenkara se suffit à lui-même avec sa propre place dans l'histoire. Pour cette seule raison je n'accorde pas de valeur à "mon" tenkara, en tout cas pour l'instant.
Six années peuvent paraître être beaucoup pour certains mais à mon sens ça n'est rien comparé à l'histoire du tenkara. Six années d'étude à temps très partiel des techniques Japonaises ne donnent pas à un pêcheur une vraie connaissance ni une compréhension suffisante du tenkara pour pouvoir l'enseigner à mon humble avis. Donc tant que je n'aurai pas étudié et maîtrisé les techniques de ceux que nous appelons les "maîtres", ces pêcheurs Japonais qui ont pratiqué toute leur vie, je n'accorderai pas de grande valeur à ma propre façon de pêcher. Maintenant que j'ai dit ça je pense qu'il faut aussi dire que j'ai confiance dans ma façon de pêcher, dans ma capacité à trouver les poissons, à leur présenter ma mouche et à détecter les touches mais je ne laisse jamais cette confiance devenir un excès de confiance ou de l'ignorance. J'essaierai toujours de voir le tenkara comme la technique d'un autre que j'ai apprise et je trouverais difficile d'imaginer qu'un pêcheur comme moi ait beaucoup à ajouter aux techniques de tenkara déjà existantes. Peut-être finirai-je par avoir tort à ce sujet mais j'en doute.
Une raison pour laquelle j'insiste est que j'espère que cela serve de leçon aux débutants au tenkara. Passez du temps à connaître l'histoire. Comprenez les différents styles et la culture autour de laquelle le tenkara s'est construit. Respectez sa définition même si vous voulez pêcher d'autres poissons avec une canne tenkara. Respectez les origines du tenkara et les gens qui vous l'ont fait connaître. Respectez vous vous-mêmes en étant ouverts d'esprit et apprenez ces faits avant de faire votre pêche. Si vous faites cela, même si ensuite vous faites autre chose, cela n'en sera que plus valorisant pour vous.
Maintenant je reviens à la partie la plus facile de la question: le matériel! Mes cannes tenkara favorites sont toutes des "full flex" telles que la Oni Type III et la Shimano ZL Keiryu Tenkara. Mes mouches préférées sont de simples noyées à l'ancienne à collerette souple ou rigide...araignées ou kebari en fonction de la façon dont elles sont montées. Mes lignes favorites sont les lignes parallèles étant donné que dans le tenkara Japonais  on ne laisse jamais la ligne en contact avec l'eau. Je porte habituellement une épuisette Mankyu, un sling pack Zimmerbuilt, un couteau et le moins de matériel possible. Pour marcher dans l'eau je ne porte des waders que l'hiver, sinon j'utilise l'équipement typiquement Japonais de "wet wading" puisque je suis sûr de ne pas aller dans l'eau sauf si c'est absolument nécessaire.


Merci pour ces réponses très intéressantes sur ta perspective du tenkara! J'ai remarqué que bon nombre de passionnés de tenkara, ceux qu'on pourrait appeler des "accroc", ont aussi d'autres passions auxquels ils sont totalement dévoués et dans certains cas ont même été des pionniers de disciplines comme le BMX, le skateboard, le deltaplante, etc. As-tu d'autres passions que le tenkara?

Oui, j'aime beaucoup la randonnée, c'est ce qui a amené au tenkara en premier. J'essaie de passer beaucoup de temps dans les Adirondack à New-York et j'aime vraiment les Montagnes Blanches aussi. J'irai à de nouveaux endroits l'an prochain donc vous pouvez vous attendre à me lire plus souvent! Quand je suis à la pêche et en randonnée je cherche aussi des champignons mais je ne sais en identifier que quelques espèces pour l'instant.
J'aime le vélo tout terrain bien que je n'ai pas beaucoup pratiqué beaucoup depuis que je me suis installé en ville il y a six ans. J'espère avoir l'occasion de pratiquer plus à l'avenir parce que j'aime vraiment ça. Je me souviens que je roulais même en hiver, comme je le fais pour la pêche, dans les sentiers noueux de Peekskill et un partout dans l'état. L'été je m'entraînais dans un parc local et j'ai même fait un voyage en Utah pour rouler à Moab, Zion, Salta, Fruita, Parc City, Deer Valley et pas mal d'autres endroits magnifiques. C'était une sacrée expérience et j'espère retourner dans certains de ces endroits.
Je pense pouvoir mentionner aussi que j'aime les thés Chinois. C'est une habitude quasi-quotidienne plus qu'un loisir mais trouver des thés est presqu'un loisir en soi. J'ai un set complet avec un gaiwan, une table à thé et quelques tasses que j'ai ramené de différents endroits du monde. Le thé est un calmant, il est bon pour la santé et sa préparation est méditative et apaisante.
Et puis mon travail dans le vin...je serai hors sujet si je n'en parlais pas. Bien que ce travail a par certains aspects tempéré ma passion pour le vin, ça m'intrigue encore et maintient mon intérêt. J'aime ouvrir quelques bouteilles en bonne compagnie ou boire un bon verre en montant des mouches.

Merci Adam de m'avoir accordé du temps pour cette interview! Je te laisse conclure à ta guise.

C'est bien d'avoir cette opportunité avec toi car je lis ton blog et suis tes aventures depuis un bon moment aussi! Vous savez, ce qui compte pour moi est l'idée de vraiment comprendre le tenkara et ce qui le définit. Je pense que dans toute l'agitation internationale autour de cette nouvelle discipline depuis son introduction on a d'une certaine façon dilué les styles et le sens originaux dans le marketing.
Je me suis concentré à me connecter à ce qui est la définition du tenkara depuis mon premier voyage au Japon il y a deux ans. Le tenkara vient du Japon. Ca ne vient pas des Etats-Unis où la plupart des cannes produites sont plus rigides et ne travaillent pas comme le font les cannes tenkara Japonaises. Les compagnies occidentales n'ont pas de mandrins de cannes tenkara pour les étudier ni pour expérimenter différentes épaisseurs ou tressages de fibre de carbone avant de sortir des cannes qui seront tout de même présentées comme les meilleures du marché. Il me semble que la plupart des compagnies qui font des cannes aujourd'hui en occident ne se basent sur rien de solide en terme de connaissance du tenkara et j'aimerais voir cela changer. On ne peut pas créer quelque chose si on ne sait pas quel est le but final de cet objet, n'est-ce pas? C'est stupéfiant que toutes ces connaissances soient disponibles et que si peu choisissent d'aller vers elles. La majeure partie de ce que les gens pensent qu'ils sont les premiers à faire, qu'ils découvrent par eux-mêmes, a déjà été expérimenté au Japon. Avant que nous, les acteurs actifs dans cette niche qu'est le tenkara, tentions de changer ce sport et sa définition, nous devons d'abord devenir des experts, ou des maîtres si vous préférez, de ces connaissances qui nous sont pré-existantes. Nous devons résister à l'envie d'être ignorants et décider de faire les choses "comme elles nous plaisent". Ce n'est pas la bonne façon de penser. Tenkara est le nom d'un sport qui est une niche à l'intérieur d'une autre. Essayer de définir le tenkara comme "ce que j'ai envie que ce soit" n'est pas seulement incorrect pour le tenkara c'est aussi irrespectueux pour les Japonais qui ont créé ces techniques et détruit les efforts et le temps consacré par les maîtres à créer ce sport.

J'espère vous rencontrer un jour à la pêche aux Etats-Unis! Bye!



samedi 29 octobre 2016

Discovering Tenkara Vol.3: Japanese Kebari. Practical Fishing Applications

Je vous avais déjà parlé il y a deux ans puis l'année dernière des excellents documentaires réalisés par John Pearson et Paul Gaskell  et c'est le troisième volet de cette saga que je vais  aborder aujourd'hui après l'avoir visionné plusieurs fois depuis sa sortie en Juillet dernier.

Ce documentaire de 90 minutes se compose de treize chapitres consacrés comme l'indique le titre aux applications des kebari utilisées par les protagonistes en présence. 


La première personne interviewée est Shoichi Saito qui pratique encore aujourd'hui le tenkara avec du matériel traditionnel. Il explique dans l'entretien pourquoi il ne pêche qu'avec des montages traditionnels et l'utilisation qu'il en fait. Si le tenkara traditionnel était pratiqué avec un souci d'efficacité et de rendement le tenkara contemporain tel qu'il est pratiqué aujourd'hui au Japon est essentiellement basé sur le plaisir de pêcher avec sa, ou ses, technique(s) favorite(s). Saito-san ne pêche qu'avec une kebari déclinée en deux tailles et trois couleurs. Cela peut paraître être peu mais il explique très bien pourquoi il a fait ce choix et il est des plus rationnels et comme souvent le fruit d'une observation raisonnée. Comme la plupart des pêcheurs au tenkara qui ont une longue expérience Saito-san base sa pêche sur la technique et non sur le matériel et il explique dans l'interview les trois techniques les plus probantes de sa pratique.


Saito-san n'est pas seulement un pêcheur mais aussi un inlassable promoteur du tenkara et du prendre et relâcher. Il enseigne depuis de nombreuses années la pêche et le montage aux enfants de l'école primaire d'Itoshiro.


Le second protagoniste de ce documentaire est un pêcheur que j'ai eu le plaisir de rencontrer lors de mon séjour au Japon Kazuo Kurahashi que tout le monde surnomme Kura-san qui réalise un montage qu'il utilise communément et nous explique sa théorie de ses montages. Là encore il se base sur son observation du comportement alimentaire des salmonidés qu'il pêche en fonction des saisons. Kura-san étant adepte du prendre et relâcher il n'utilise pas de kebari montées sur des hameçons de trop petite taille afin d'éviter de longues manipulation qui sont néfastes pour les poissons.


On retrouve ensuite Go Ishii, qui est l'interprète dans le documentaire, en tant qu'intervenant et il se livre à une séance de montage commentée. Le dialogue entre John et Go est très intéressant et je pense qu'il résume très bien la perspective des pêcheurs Japonais sur le tenkara: "C'est un loisir alors si ça ne vous amuse pas de le pratiquer à quoi bon le pratiquer?"
Ce documentaire compte également une séquence de montage par un excellent pêcheur en la personne de Kazumi "Ajari" Saigo. Il monte deux kebari différentes de par les matériaux utilisés, par leur design et bien sûr leur fonction puisqu'un pêcheur au tenkara ne choisit pas la kebari qu'il noue à son bas de ligne en raison de son apparence mais en fonction de la façon dont il souhaite pêcher. Etant un ancien pêcheur de compétition Kazumi Saigo a été séduit par le tenkara en raison de sa simplicité matérielle et de son efficacité technique.
Le dernier pêcheur intervenant est Tadashi Otani qui réalise un montage assez typique de son approche du montage qui est principalement basé sur la vitesse de plongée souhaitée de sa kebari attendu qu'Otani-san ne pêche que sous la surface. Ses montages sont très originaux et comme il le le dit en souriant: "Je suppose que les poissons n'ont pas toujours envie de manger la même chose."

Entre chacune de ces séquences on retrouve John et Paul qui résument brièvement et brillamment les faits mis à jour par les différents protagonistes. Comme cela avait été le cas avec les deux premiers volumes c'est vraiment un film très agréable à regarder et très riche en informations de première main puisque John et Paul depuis le début ont fait le choix louable d'aller chercher dès la début du projet "Discovering Tenkara" les bonnes informations à la source c'est à dire au Japon. J'attends maintenant le quatrième volet qui je n'en doute pas sera aussi passionnant que le sont les trois premiers.

Si vous souhaitez vous procurer ce DVD il vous suffit de cliquer ici.





samedi 24 septembre 2016

Une saison s'achève

Le caniculaire mois d'Août s'est pour moi déroulé sans pêche mais par chance Septembre a commencé par des journées pluvieuses ce qui était plutôt une bonne nouvelle pour les rivières et leurs habitants. Je partais donc dimanche dernier pour la fermeture de la pêche en première catégorie sous un ciel voilé et des températures clémentes. 


Les quelques pluies des jours précédents n'ont évidemment pas eu grand effet sur le niveau de l'eau mais un apport d'eau fait un baisser la température et remet les poissons en activité. Je me préparai donc sans empressement. Mon matériel était constitué de la canne Nissin Zerosum Oni Honryu 395, de six mètres de level line 号2.5, un mètre de fluorocarbone en 12/100 auquel était nouée une Yamato kebari. 


Je pêchai vers l'aval tous les postes abordés. Après le lancer je donnai à ma canne un mouvement oscillant de bas en haut afin de faire dériver ma kebari de façon erratique c'est à dire comme nage une véritable nymphe emportée par le courant. J'avais expérimenté avec succès cette technique l'été dernier avec Masami "Tenkara-no Oni " Sakakibara et comme je l'avais déjà constaté les techniques développées au Japon par les vrais experts du tenkara sont efficaces sur n'importe quel cours d'eau car elles sont basées sur l'observation rationnelle du comportement des salmonidés et sur une longue expérience de la pêche au tenkara. 





Toutes les truites prises pendant cette sortie prirent ma kebari au moment ascendant, quand elle remontait vers la surface. Cette technique donne de très bons résultats pour peu qu'on soit concentrés sur sa pêche car la ligne tendue en permanence aide à des ferrages très efficaces. 


Finalement vers la fin de la matinée le ciel s'éclaircît et je fis une pause pour déjeuner au bord de la rivière comme j'aime le faire dès que la météo le permet. L'endroit est généralement beaucoup fréquenté mais je ne vis personne en ce jour de fermeture.


Je pris au cours de cette dernière visite bon nombre de truites ravivées par les pluies récentes. Je ne parcourrai pas  une grande distance au cours de la matinée mais j'exploitai au mieux tous les postes à portée.


Après environ trois heures de pêche je repliai ma canne, en déconnectai la ligne que je remettais en place sur une bobine et rebroussai chemin jusqu'à chez moi. L'automne commence bien pour les truites, la pluie si bénéfique aux rivières après un été très chaud est de retour et les pêcheurs vont avoir les six prochains mois pour préparer la prochaine saison.
Ce matin je suis passé à proximité de cette rivière, ayant un peu de temps j'ai arrêté ma voiture sur le bord de la route pour aller l'observer; des gobages dans la brume en train de disparaître sous les rayons du soleil. 







mercredi 31 août 2016

La canne Nissin Zerosum Oni Honryu 395

Masami Sakakibara nous avait surpris l'année dernière avec l'excellente canne Nissin Zerosum Oni Honryu 450 et il a récidivé cette année avec celle dont il va être question aujourd'hui: la Nissin Zerosum Oni Honryu 395. 


Les caractéristiques théoriques de cette canne sont les suivants:

Longueur: 3,95 m
Brins: 8
Repliée: 64 cm
Poids: 85 g
Diamètre scion: 0,65 mm
Diamètre talon: 11,7 mm
Bas de ligne conseillé: 号 0,8 à 号 1,5 
Composition: 96% graphite


Ma canne mesure 3,98 mètres et son poids sans le bouchon de scion, donc en action de pêche, est de 82,5 grammes. 
La poignée faite d'un liège de très bonne qualité a une longueur de 30 centimètres à la forme similaire à la Zerosum Oni Honryu 450. Cette poignée est très confortable et assure une excellente tenue de la canne, à mon avis mieux que les poignées aux courbes plus prononcées comme les Royal Stage ou les Zerosum. 


La Zerosum Oni Honryu 395 est similaire sur le plan esthétique à sa grande soeur sortie l'an dernier la Zerosum Oni Honryu 450  et la qualité de fabrication est au même niveau c'est à dire exceptionnel.
Il est clair que ce duo de cannes se démarquent de la majorité des productions actuelles par le travail effectué non seulement pour développer ces cannes répondant à un niveau d'exigence rarement égalé.





Concernant la pêche avec cette canne on a affaire ici à une canne à l'équilibre parfait. Il en ressort donc une grande aisance à s'adapter à tout type de ligne tout en maintenant un niveau de performance optimum. 
Je pense que la personne qui a le mieux décrit cette canne est John Vetterli, co-fondateur de Tenkara Guides LLC: "Cette canne repousse les limites des performances maximum d'une canne tenkara dans un territoire jusque là inexploré. Poids faible, superbe équilibre, puissance massive en réserve. Cette canne et sa grande soeur, la Nissin Zerosum Oni Honryu 450, sont les équivalents dans le domaine du tenkara des hyper-cars d'aujourd'hui comme la Porsche 918 ou la Koenigsegg One-1."

mercredi 3 août 2016

Tenkara en Juillet

Le mois d'Août vient de commencer, il est donc temps de publier un résumé de ma pêche au mois de Juillet. Après un mois de Juin des plus incertains sur le plan météorologique Juillet a été très chaud ce qui finalement a eu du bon car cela a permis de faire baisser un peu le niveau sur la plupart des cours d'eau de la région. 


J'ai gardé tout au long du mois la même stratégie qu'en Juin c'est à dire multiplier les sessions de pêche courtes (2 heures maximum) mais en m'adaptant aux températures donc en pêchant uniquement tôt le matin ou tard le soir.

























Je pêchai tout le mois avec le même matériel: canne Nissin Zerosum Oni 450, level line Nissin Ony-ryu 号2.5 et ma fidèle Yamato kebari. N'ayant plus de dubbing de lapin sous la main je suis passé un peu par hasard au dubbing de lièvre. Une heureuse coïncidence a fait que j'ai reçu par une firme de fly-tying un échantillon du dit dubbing de lièvre le matin même où je me rendis compte ne plus avoir de dubbing de lapin. Bien entendu cela ne change rien à l'efficacité de ma Yamato kebari ni à sa fonction, cela ne modifie qu'un peu son apparence. Les truites, myopes comme des taupes, ne font pas la différence. 




Août commence par des journées grises et pluvieuses, la pêche sera sûrement moins facile mais on verra bien...

jeudi 30 juin 2016

Tenkara pendant une éclaircie

Le mois de Juin touche à sa fin et n'en finit pas d'enchaîner les journées grises, la pluie et les orages; il faut ne pas laisser une seule occasion d'aller à la pêche car il est bien difficile de faire des prévisions météo tant ces conditions sont instables. Quelques heures de soleil peuvent être suivies d'une journée complète de pluie ou d'un orage. Les rivières portent les stigmates de ces pluies récurrentes, elles sont restées teintées comme elles l'étaient en Avril.


Mais dès qu'une éclaircie dure un peu les truites montrent un peu d'activité. Finalement ces pluies fréquentes qui maintiennent l'eau à une température basse leur profite, en tout cas leur permet d'être plus tranquille que d'habitude car nombre de pêcheurs ont depuis longtemps remis les cannes au repos. Pour ma part j'ai choisi de pêcher mais uniquement sur de brèves sessions de trente minutes à une heure, cela m'évite le risque d'être surpris par la pluie ou l'orage avant d'avoir pris au moins une truite. 


Je pêche avec ma Yamato kebari et je dois dire que c'est un plaisir de voir les truites sortir de leurs caches pour venir la chercher. Je n'échangerai pour rien au monde une seule de ces kebari contre des nymphes lestées qui me priveraient de voir ces petits éclairs jaune et gris monter vers la surface. 


Pêchant une rivière que je ne visite que rarement je pense avoir choisi la bonne portion car la densité de truites est intéressante et les truites en question répondent à mes sollicitations malgré une eau assez sombre et qu'il y ait bien peu d'insectes à émerger ou s'échouer.
 


Je ne vais bien sûr pas me plaindre! Pêcher même avec des conditions météorologiques difficiles, les températures sont très en dessous des moyennes saisonnières et je peux à tout moment être surpris par une averse, est mille fois plus intéressant et valable que de penser à la pêche sans y être. 


Avec une canne de quatre mètres cinquante dans cette rivière de huit à neuf mètres de large j'obtiens facilement des dérives "naturelles", mon bas de ligne court et fin fait nager ma kebari d'une façon qui doit être très convaincante car celle-ci fait bouger les truites très rapidement. 



Après avoir pêché en remontant cette ligne droite j'arrive à un virage où la rivière est très peu profonde, l'eau y est un peu plus claire. Satisfait de cette sortie je me dis que l'heure du dernier lancer est arrivé, il y a une petite zone calme à droite du virage derrière un gros caillou. Ce serait surprenant qu'une truite n'occupe pas ce poste. J'y lance ma Yamato kebari qui a à peine le temps de commencer à dériver qu'une truite la prend. C'est une grosse truite! Je suis surpris mais je fais un ferrage instinctivement très ample, la rivière est si peu profonde que la truite n'a nulle part où aller. Je la laisse se débattre sur les graviers. 


Ce n'est pas une truite fario autochtone, sa robe trahit son origine mais je remarque que ses nageoires sont en excellent état donc c'est sans aucun doute une truite qui a survécu à son introduction dans la rivière et y a grandi. Je la soulève délicatement et la relâche exactement à l'endroit où je viens de la prendre. Je passerai quelques minutes à l'observer dans son trou où elle reprenait son souffle calmement. Je repliai ma canne et remis ma ligne sur ma bobine, il était temps de rebrousser chemin. En attendant la prochaine éclaircie.

samedi 18 juin 2016

Tenkara Fest 2016

A l'issue de la première édition du Tenkara Fest nous étions décidés, Eric Robert et moi-même, à organiser cet événement annuellement et cette année nous avions choisi la Lozère pour nous y retrouver. Comme nombre de pêcheurs nous sommes membres de divers réseaux sociaux et forums mais nous partageons le point de vue que rien ne vaudra jamais de rencontrer dans la réalité d'autres passionnés, ou des néophytes, et de partager quelques bons moments ensemble. 


Après environ huit cents cinquante kilomètres j'arrivai en Lozère sur les berges de l'Alignon où je devais rencontrer un jeune homme qui m'avait contacté via ce blog pour me demander de l'initier au tenkara, pêche qu'il avait envie de découvrir car comme il me le dît lui-même elle correspondait exactement à l'image qu'il se faisait de la pêche à la mouche.


Ce fût pour moi un plaisir de conseiller ce pêcheur qui montra rapidement de belles capacités et prit d'ailleurs assez vite sa première truite au tenkara.  



Je rejoignais ensuite les autres participants dans un gîte idéalement situé dans un endroit d'où nous avions un panorama vraiment grandiose. Mes camarades revenaient d'une belle partie de pêche fructueuse sur un parcours situé dans le village voisin et nous étions donc tous d'excellente humeur et bien contents de nous retrouver après un an.


Nous passerons une excellente soirée dans un esprit de partage et d'échange. Après cette première journée bien remplie nous étions fatigués et ne résistions pas bien longtemps à l'envie de se jeter dans les bras de Morphée. Pour ma part après neuf heures de conduite et deux heures de pêche j'étais littéralement lessivé. Le lendemain matin réveillés aux aurores par le chant du coucou voisin nous prenions un rapide petit déjeuner avant de descendre vers les berges du Tarn.


Sur ce tronçon les berges sont très encaissées, la rivière étroite mais ce fût pour moi un excellent moment de la découvrir en binôme avec mon ami Edouard pendant que Guilhem, Eric et Jean-Marc parcourait une zone en aval. Notre parcours est bien peuplé de truites fario sauvages et très discrètes et ce fût un plaisir d'en faire monter quelques unes sur nos imitations, voir ces truites foncer toute nageoire dehors sur ce qu'elles croient être un insecte qui s'échoue sur l'onde est très amusant. Lorsque deux heures plus tard nous redescendrons vers notre point de départ nous nous rendrons compte de n'avoir parcouru qu'environ trois cent mètres malgré de belles séances d'escalade. Ce fût d'ailleurs l'occasion d'observer sous le pont d'où nous étions partis une très belle truite postée à la sortie d'un courant en attendant que le courant lui serve de quoi se nourrir. 


Revenus à notre point de départ nous retrouvions nos amis qui avaient eux aussi passé un bon moment de pêche sur une portion plus en aval et nous décidions d'aller déjeuner avant de nous rendre dans les gorges du Tarn.


Le début de l'après-midi fût difficile à cause du vent qui s'engouffrait dans les gorges, il était difficile de garder le contrôle de nos lignes, ce qui est indispensable à la réussite au tenkara mais nous avions la chance de pratiquer dans des décors splendides et n'avions pas de doute sur notre capacité à contrer les difficultés. Edouard fût le premier d'entre nous à tromper une truite.


Le vent descendit vers seize heures nous offrant deux heures pendant lesquelles nous prendrons bon nombre de truites. 







Nous pêcherons ainsi avec succès à mesure que nous prenions de l'altitude. Les dernières cascades nous offrirent un spectacle grandiose et nous arrivions ensuite sur le plateau où le Tarn coule entre prés et forêts.


Arrivés sur le plateau nous pêcherons encore un peu et c'est avec surprise que je constatai à quel point les truites du plateau différaient par leur robe de celles des gorges.




Comblés par cet après-midi de pêche nous décidions de replier les cannes et nous fûmes rejoints par Eric et Jean-Marc qui avait pêché plus haut en aval sur le plateau. 


Après cette excellente journée de pêche nous rentrions au gîte où nous passerons une soirée mémorable.
Le lendemain nous allions à quelques kilomètres pêcher sur le Lot mais la matinée fût très fraîche et surtout venteuse, rendant la pêche très difficile bien que nous ayons eu l'opportunité d'observer de nombreuses truites sur le parcours où nous étions. 







Le ciel s'éclaircit en fin de matinée et c'est à l'ombre d'un platane que nous déjeunions avant d'être rejoints par plusieurs personnes avec qui nous nous rendions quelques kilomètres en aval sur un très beau parcours no-kill. Nous y ferons une belle visite ponctuée de belles captures. J'aurai l'occasion dans quelques semaines de revenir sur cette partie du Tenkara Fest.



Après trois jours passés ensemble nous nous séparions, tous contents d'avoir partagé notre passion pour le tenkara et nous nous disions: "A l'année prochaine!"